Aprés 10 jours passés en Palestine j'essaie de mettre en ordre quelques idées sans avoir l'ambition d'avoir tout compris.
Question: Combien y a-t'il de Palestiniens ?
Réponse: Les Palestiniens ne forment pas un groupe homogène.
- En Israël il y a 7 millions d'habitants dont 1,3millions d'Arabes ou de Druzes et 1 million de "Russes" , en fait originaires de l'ancienne URSS, et qui pour 40% ne sont pas juifs. Ils ont tous un passeport israëlien.
- Dans les territoires occupés, 1,3 million de Palestiniens vivent à Gaza et autant en Cisjordanie. Ils ont une carte d'identité délivrée par l'Autorité palestinienne. Pour venir à Jérusalem ils ont besoin d'une autorisation qu'ils n'obtiennent pas s'ils sont jeunes ou fichés politiquement. Parmi les Palestiniens de Betlhéem trés peu sont venus à Jérusalem, les deux villes sont distantes de 10km.
- A Jérusalem il y a 750 000 habitants dont 1/3 sont des Arabes. Ils ont le statut de résident de Jérusalem . Les 250 000 Palestiniens ont un passeport jordanien qui leur permet de voyager dans le monde.
- Des Palestiniens vivent aussi à l'étranger et en particulier dans les pays arabes. Ils sont 300 000 au Liban, contituent 1/3 de la population de la Jordanie et il y a des camps palestiniens en Syrie.
Q : Quel est l'état des implantations israéliennes dans les territoires occupés ?
R : Il faut parler de colonies juives car elles sont le fait de Juifs militants. IL y a entre 250 et 300 colonies qui regroupent plus de 400 000 personnes. Certaines sont trés grandes comme Ma'ale Adumin avec 50 000 personnes ou Ariel, d'autres ne sont contituées que de quelques bungalows. Elles sont soutenues par des associations ou des agences semi-étatiques qui agissent avec l'autorisation et le soutien du gouvernement israélien. Toute nouvelle colonie est immédiatement protégée par l'armée. De temps en temps on rase quelques bungalows, l'action est fortement médiatisée pour montrer que l'on est un état démocratique respectueux des lois internationales, mais simultanément les implantations continuent à se développer ailleurs.
Q: Qu'elle est la situation économique de la Palestine ?
R: Elle est catastrophique car dans cette Palestine qui n'est pas un pays rien ne fonctionne et la circulation est trés difficile. Aller de Betlhéem à Ramallah peut prendre un jour pour un Palestinien, il y a 30km entre les deux villes. C'est une économie à la merci de l'administration israëlienne. La Palestine ne survit que par les aides internationales. A Gaza 40% de la population vit avec moins de un euro par jour.
Actuellement trois guerres se déroulent dans le pays.
- Une guerre militaire entre Israël et des groupes palestiniens extrémistes. Elle entraîne des incursions continues de l'armée à Gaza et dans les territoires occupés. L'armée israélienne est partout présente, à l'entrée des villes, au bord des routes et face à tous les mouvements. Les soldats sont en général trés jeunes et ils ont une attitude décontractée. On les voit boire, manger, fumer ou téléphoner sur leur portable. Mais leurs armes sont bien réelles et lorsqu'ils arrêtent quelqu'un pour contrôler des papiers ou un panier, personne ne conteste leur autorité. C'est aussi eux que l'on rencontre pour franchir le mur. Ils sont isolés derriére des vitres et parlent de façon autoritaire limite impolie, mais leur rôle est difficile.
12 000 Palestiniens, des hommes mais aussi des femmes et des enfants sont en prison en Israël, certains depuis très longtemps.

- Une guerre économique. En Palestine rien ne fonctionne, tout est bloqué. C’est une économie de subsistance et de mendicité. Circuler en Palestine est toujours long. Les routes sont étroites et tortueuses et les barrages nombreux. Lorsqu’un bus est arrêté à un barrage, un homme ou une femme, jeune, monte dans le bus avec son arme et regarde les papiers des passagers. En général quelques personnes sont invitées à descendre pour des contrôles complémentaires. Lorsque je suis rentré de Naplouse, au check point entre Ramallah et Jérusalem, la jeune militaire a fait descendre tous ceux qui avaient moins de 30 ans. Les 5 filles voilées sont revenues 10 minutes après, les 3 garçons n’étaient pas là quand nous sommes repartis, ils prendront sans doute le bus suivant. J’ai mis 3 heures pour faire 100km.

- Une guerre de l’information où le Palestinien est décrit comme le terroriste. J’ai beaucoup discuté et rencontré des gens qui défendent la position d’Israël : elle est légitime car tous ses voisins veulent rayer ce pays de la carte. Les colonies ne sont que des pions que l’on utilisera dans une négociation future. Ils mettent en avant le grand travail effectué par les Israéliens face aux retards palestiniens. Chez certains ce discours est sincère mais il oublie totalement les souffrances d’un peuple qui actuellement est soumis et passif face à l’armée israélienne. La grande majorité des Palestiniens veut la paix, la majorité des Israéliens sans doute aussi. Mais l’Israélien apparaît toujours comme une victime et le Palestinien comme un terroriste. Dans les bus j’ai à plusieurs reprises essayé de discuter avec de jeunes juifs. Mais aucun d’eux ne parlant anglais... Pour moi il est impossible que tous ne parlent qu’hébreux, c’est un refus de parler que je ne m’explique pas.

Q : Quelles sont les évolutions possibles ?

R : Il n’y a pas de solution à long terme sans traitement de questions de fond : création d’un état palestinien, statut de Jérusalem, avenir des colonies, droit au retour des réfugiés, problème de l’eau …Les murs et les checks points sont la solution actuelle mais en réalité tout reste à faire. A long terme, à plus de 30 ans, personne ne sait ce qui peut se passer. Au milieu de ce pessimisme on trouve des gens qui travaillent au développement de la Palestine sans se poser de questions ou plutôt sans s’arrêter à des problèmes insolubles. Ils pensent qu’un peuple plus fort imposera la paix entre Palestiniens puis dans la région.
Paix en Israël et Palestine est le vœu que je formule à la fin de ce voyage.